A l’aube, il est l’heure de se lever… des nausées… vous allez à la salle de bain, le regard dans le miroir, soupir. Vous touchez votre ventre, grossesse à risque. Soupir. Café et départ pour la boulangerie industrielle “La Suiza”. Tout droit en enfer.

Sur le chemin de la boulangerie, les pensées s’agglutinent autour des plus de huitante heures supplémentaires faites par mois, gratuites; les vacances dues et non accordées par le patron; le harcèlement sexuel que vous subissez de la part du patron… Soupir. Dans toutes ces conditions arrive enfin l’arrêt de travail salutaire notamment pour la grossesse. Il y en a marre !

Vous vous adressez à la CNT XiXón (Asturies, Espagne) pour obtenir des conseils et du soutien, vous racontez toutes les irrégularités, détaillez tous les abus et atrocités qui ont été commis sur votre personne et lieu de travail. Vous réalisez la nécessité de lutter pour vos droits. Vous vous organisez. La peur est moins oppressante et vous faites tout ce que vous pouvez pour obtenir justice.

 

C’est l’histoire vraie d’une femme de Xixón qui, en 2017, travaillait à la boulangerie industrielle “La Suiza”. Le syndicat CNT a pris en main le conflit qui est devenu collectif et public. La CNT Xixón a tenté des réunions avec le patron, qui a refusé de parvenir à un accord. Cela a donné lieu à des rassemblements devant les portes de la boulangerie : un outil syndical que le syndicat met en place partout afin de rendre le conflit visible et ainsi pouvoir négocier. Un outil légitime des syndicats de base qui est protégé par les droits de la liberté d’association, de la liberté d’expression et de la liberté de manifestation.

La justice avait tout pour faire justice… mais après que la police a identifié des camarades lors d’un de ces rassemblements, des arrestations et des plaintes commencèrent à arriver. C’est ainsi qu’a commencé une longue procédure judiciaire qui a duré 8 ans maintenant et qui a abouti, dans un premier temps, à un jugement du Tribunal supérieur de justice des Asturies condamnant six camarades (cinq femmes et un homme) de la CNT Xixón à trois ans et demi de prison pour « contrainte grave », « entrave à la justice » et à payer une amende de plus de 150 mille euros.

Le cas de “Las Seis de La Suiza” s’inscrit dans le cadre du durcissement de la répression syndicale et sociale résultant de la loi « mordaza » (en français, « loi bâillon »). De nombreux processus dans différentes régions d’Espagne ont subi la même répression: “El Coño Insumiso” à Séville et Malaga, la persécution du mouvement féministe valencien après la grève du 8 mars 2018 et tant d’autres!

C’est une dérive autoritaire et judiciaire contre le féminisme et le syndicalisme de base. Comme le dit le collectif GRUPU SUFITU qui soutient le groupe des 6 :

« L’attaque contre les droits fondamentaux nous concerne toutes et tous, c’est pourquoi en manifestant notre plus fort rejet face à cette situation, nous nous défendons en fait nous-mêmes, en déclarant que nous ne nous laisserons pas dépouiller de ce que nous avons si durement acquis. Si [le féminisme et le syndicalisme] sont un crime comme le disent le Tribunal pénal de Xixón, l’Audience provinciale, la Cour suprême et la Cour constitutionnelle [espagnoles], alors nous continuerons à lutter contre celles et ceux qui profitent de la [précarité] des autres pour s’enrichir, contre les abus des puissants, contre celles et ceux qui portent atteinte à la dignité de l’être humain. »

Nous sommes des leurs et mettrons tous les moyens dont nous disposons pour défendre nos camarades. Plus d’infos sur : www.6delasuiza.info où il est possible de participer à une campagne de selfies dans un très grand nombre de langues !

SOLIDARIDAD CON LAS SEIS DE LA SUIZA !