Je suis née à la fin des années 60, mais quelle malchance! Pourquoi mes parents ne m’ont-ils pas fabriquée pour que je naisse en janvier de n’importe quelle année précédente?
J’ai commencé à enseigner au début des années 1990. J’ai fait le Séminaire pédagogique après une licence universitaire, avec 13 périodes d’enseignement (fourchette 8-12, payées) et le reste en cours théoriques.
Pour la prime d’ancienneté, cette année ne compte pas.
1995: rouleau compresseur EVM. On va faire de vous des professionnels !
Enfants: obligation de prendre le congé maternité 2 semaines avant le terme, et 4 mois d’arrêt au total, 5 si allaitement. Point.
Plan Orchidée, pour-cent de solidarité.
Puis allongement du temps pour accéder au haut des classes de salaires (10, 15 puis 20 ans). J’ai raté la marche à chaque fois. Quelle maladroite!
DECFO-SYSREM: arrivée à 18 ans d’enseignement, paf !, changement de classes de salaire, pas en haut dans l’ancien système, mais trop haut dans le nouveau. Aucune augmentation de salaire depuis.
Puis allongement de deux ans pour la retraite: 60 à 62 ans minimum.
Puis LÉO, 360, edunum. On va développer vos compétences !
Et maintenant, perspective autour d’une élévation de l’âge de la retraite pour la Caisse de pension.
Et 0,7% de solidarité, mais avec qui? Ceux qui ont bénéficié du bouclier fiscal? Combien l’Etat de Vaud a-t-il gagné sur mon dos?
Que l’on ne vienne pas me dire que je suis une boomeuse chanceuse!
Épuisée professionnellement, je m’accroche à mes quelques malheureuses périodes de décharge de fin de carrière… et voilà que ça aussi ça me passe sous le nez.
Élèves difficiles, numérique, jeunisme, âgisme. Il y a vraiment de quoi devenir, comme l’a dit un élève qui se faisait recadrer à une collègue aussi vieille que moi: « Mais vous êtes aigrie ! ».
Certes il y a une certaine sécurité de l’emploi,
Certes je fais le plus beau métier du monde,
Certes mes conditions ne sont pas celles d’une banlieue française,
Certes mon pouvoir d’achat reste suffisant,
Certes…
Mais il est difficile de ne pas avoir envie de pousser un coup de gueule.